Nous vivons à l’âge numérique, un âge de transformation globale et de rupture stratégique. Qu’il s’agisse de la réussite de notre économie dans la compétition mondiale ou de la paix et de la puissance à l’échelle globale, le numérique est désormais un enjeu majeur pour notre politique étrangère et pour l’action publique dans son ensemble.
L’espace numérique peut donner à nos valeurs démocratiques un nouveau souffle, mais nous faisons aussi face au risque d’un monde numérique manipulé contre les vertus d’ouverture dont il devait être le garant. La remise en question de la neutralité du Net en est un nouvel exemple. La France réitère son attachement à ce principe.
Notre premier défi est de faire de la France un pôle d’excellence numérique en confortant d’abord un écosystème favorable à l’innovation et à l’investissement. La French Tech est là pour accompagner le développement des start-up dans tous les secteurs. Renforcer l’activité numérique dans notre pays, c’est aussi assurer notre attractivité : c’est le sens du French Tech Ticket et du French Tech Visa qui permettent aux entrepreneurs et investisseurs étrangers de développer plus facilement leurs projets en France.
La clef réside dans un effort de recherche et de développement conjoint à l’échelle européenne, gage de souveraineté renforcée pour chacun des Etats membres. Il peut passer, comme l’a proposé le président de la République, par la création d’une « Agence européenne pour l’innovation de rupture ».
Cette ambition économique suppose aussi des règles du jeu équitables en matière de concurrence et de fiscalité. Nous avons besoin d’une régulation à l’échelle européenne pour limiter les distorsions économiques liées à la transition numérique. Nous travaillons donc à des projets de taxation afin que le caractère immatériel de l’activité numérique n’échappe pas à une imposition adaptée.
Mais les enjeux du numérique irriguent aussi les sujets démocratiques, justifiant l’impulsion active de la France en faveur du Partenariat pour un gouvernement ouvert, et de sécurité.
Des formes nouvelles de conflictualité apparaissent ainsi dans le cyberespace, comme l’atteste l’augmentation exponentielle des attaques informatiques à travers le monde. Les cibles sont diverses ; les attaquants le sont aussi, qu’ils soient de nature étatique ou qu’ils forment les rangs d’un véritable marché de l’ingérence.
Il faut donc que les Etats engagent entre eux, avec le secteur privé et le monde de la recherche, de nouveaux travaux pour définir des formes de régulation adaptées à l’évolution du monde numérique. Cette innovation multilatérale, réaliste et pragmatique, c’est la méthode que la France souhaite porter.
Jean-Yves Le Drian est ministre de l’Europe et des Affaires étrangères. Mounir Mahjoubi est secrétaire d’Etat au Numérique.
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